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23 septembre 2015

André Pictoel est une figure bien connue du secteur de l’énergie en Flandre et en Belgique. Ayant travaillé toute sa carrière dans le secteur de l’énergie, il a récemment pris sa retraite à la VREG, après avoir dirigé le régulateur Flamand depuis sa création en 2001. André Pictoel est donc un témoin privilégié de la libéralisation du marché de l’énergie et c’est à ce titre, nous lui avons posé quelques questions sur son vécu du secteur depuis la libéralisation des marchés de l'énergie.

L’augmentation de la concurrence était une priorité, mais n’a-t-on pas trop mis l’accent sur les prix ces dernières années ? Où les régulateurs doivent-ils désormais mettre l’accent?

Dans la phase de libéralisation du marché en Flandre, il était important pour les nouveaux fournisseurs de se faire une place sur le marché et, à ce moment-là, seul le prix pouvait inciter les clients à se détourner de leur ancien fournisseur. À l’époque et aujourd’hui encore, le consommateur considère le prix comme le principal facteur de choix d’un fournisseur donné. Ce prix restera donc toujours important, mais plus la marge de manœuvre dans ce domaine est réduite sous la pression de la concurrence, plus le consommateur sera sensible à d’autres facteurs. La VREG a rapidement compris que l’accent ne devait pas être uniquement mis sur le prix, mais également sur le service des fournisseurs et le choix entre un contrat gris ou vert. Pour preuve, les différents modules en ligne: test comparatif, contrôle des services, contrôle vert, qui ont été développés depuis plusieurs années et, d’après mes collègues de la VREG, il existe désormais aussi un module qui permet aux ménages et aux entreprises de comparer l’origine de l’électricité pour les contrats proposés en Flandre : à la fois la région/le pays d’origine ainsi que les sources d’énergie pour produire l’électricité seront visibles. Lorsque vous savez que plus de 37 % des contrats sont verts, cela signifie que le consommateur y est très attentif et que les fournisseurs peuvent exploiter cette opportunité. Je peux désormais observer le marché avec un peu plus de distance et remarque que les fournisseurs rencontrent un certain succès auprès des consommateurs s’ils sont clairs, simples et accessibles en cas de problème ou de questions. Cela reste donc certainement un point d’attention.

Vous avez participé au début de la libéralisation et accompagné ce processus pendant environ 12 ans. Quelles sont les principales réalisations?

  • La confiance du consommateur.

La VREG a fortement misé sur la communication dès les premiers instants de son existence. Il n’a pas été simple de faire comprendre au consommateur que l’électricité et le gaz n’étaient pas disponibles comme ça à tout moment et il a fallu gagner sa confiance. Il a fallu faire clairement comprendre au consommateur qu’il devait conclure un contrat pour la fourniture de gaz et d’électricité et qu’il avait également le choix, qu’il n’y avait plus une seule entreprise qui faisait tout pour eux et leur garantissait un approvisionnement permanent en électricité ou en gaz lorsqu’il changeait de fournisseur. C’est digne de la Préhistoire et impensable pour les vingtenaires/trentenaires d’aujourd’hui pour qui il est tout à fait normal de conclure un contrat avec un fournisseur lorsqu’ils emménagent dans leur appartement ou leur maison et qu’ils peuvent faire le bon choix grâce aux tests comparatifs. Entre-temps, la Flandre figure parmi les marchés les plus actifs du monde.

  • L’approche du marché.

La VREG a toujours fortement misé sur la concertation. Cela a peut-être semblé léger pour certains, car un chien de garde se doit d’aboyer et de mordre. La VREG n’a pas besoin d’adopter cette attitude pour prendre des décisions fermes et difficiles. Elle ne craint pas la confrontation avec les acteurs du marché. Elle a résolument fait le choix de rechercher le contact et de prendre une place au cœur du marché pour écouter les difficultés et les suggestions, et rechercher des solutions en concertation. Nous n’avons pas toujours recueilli l’unanimité, mais tout le monde savait pourquoi le régulateur tranchait.  

  • Une place sous le soleil.

Les directives européennes ont donné vie aux régulateurs et leur ont conféré des compétences. Les gouvernements fédéral et régionaux ont transposé ces directives en lois et décrets. Tout semblait bien défini. La VREG a elle aussi été créée de cette façon et est devenue opérationnelle le 1er décembre 2001.

Pendant ces presque 14 ans, les limites de la VREG ont été attaquées presque en permanence, mais grâce à ces antécédents, la VREG a obtenu son droit à l’existence au sein des pouvoirs publics flamands, sur le marché de l’énergie en Flandre et dans la société flamande. Son rôle est également apprécié.

Vous avez certainement aussi observé attentivement vos collègues dans d’autres régions et d’autres pays. Selon vous, y a-t-il des exemples d’autres pays ou régions que la Flandre devrait également adopter?

Pour la VREG (régulateur régional), il n’est pas du tout évident d’entrer en contact avec d’autres régulateurs européens ou d’acquérir des connaissances sur d’autres marchés. En raison du fait que la Flandre fut la première région en Belgique à libéraliser son marché, nous avons (heureusement) eu la chance de participer aux travaux des régulateurs européens en matière de ‘marchés domestiques’. Nous avons participé à de nombreuses discussions utiles et puisé de bons (mais également de moins bons) exemples. Je retiendrai qu’en Flandre/Belgique, les relations entre les régulateurs et les acteurs régulés sont restées constructives pendant les 12 dernières années, ce qui fut moins évident dans d’autres pays. À notre grand contentement, le test comparatif (V-test), le Contrôle des services (Servicecheck) et le Contrôle vert (Groencheck) ont inspiré d’autres pays.

Je remarque également que les relations entre le régulateur et le monde politique restent souvent difficiles et sont un exercice d’équilibre dans lequel la compréhension et la confiance sont essentielles.

Le génie de la lampe vous permet de formuler trois vœux pour le marché de l’énergie pour les prochaines années. Quels sont-ils?

Mon premier souhait est qu’en 2050, le marché de l’énergie entièrement composé d’énergie renouvelable soit considéré comme une donnée fixe, que le climat d’investissement soit attractif grâce à cette stabilité et que la transition vers 2050 se déroule selon une feuille de route bien définie et sans trop d'écueils.

Mon deuxième vœu est qu’on atteigne rapidement un juste équilibre sur le marché entre l’offre/les fournisseurs et la demande à un prix raisonnable pour chaque acteur, que la flexibilité sur le réseau, dans la consommation et dans la production se rencontre et que l’efficacité ne soit plus une chimère.

Mon vœu le plus cher, pour lequel j’ai besoin de tout le pouvoir du bon génie, est que l’importance de posséder le pouvoir sur les sources d’énergie disparaisse en tant que motivation pour déclencher des guerres et que le soleil, le vent, l’énergie hydraulique, etc. ainsi que les futures techniques permettant d’utiliser les sources naturelles approvisionnent chaque être humain en énergie et en eau.